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ACTUALITES / Protection de l'enfance

Réfugiés d’Ukraine : les enjeux de l’accueil

La guerre en Ukraine dure depuis plusieurs semaines désormais. Des milliers de familles ont fui leur maison, leur pays et sont désormais réfugiés. En France, beaucoup sont accueillies par des familles bénévoles. Un geste de générosité qui peut s’avérer complexe.

Anne Chantraine est psychologue à la Sauvegarde du Nord, elle agit au quotidien auprès de jeunes de 14 à 18 ans, déscolarisés et accompagnés par le SAJ de Phalempin. Auparavant, elle a travaillé pendant plusieurs années au sein de la branche lilloise de l’Association d’Aide aux Victimes, qui accompagne des victimes d’infractions pénales ou de terrorisme. Elle propose son regard de professionnelle sur la situation des réfugiés d’Ukraine.

“Les conséquences psychologiques de leur départ peuvent être importantes voire déroutantes. Ces familles ont vécu des situations de stress ou même de traumatisme psychique, ce n’est évidemment pas anodin. Nous vivons tous des situations de stress, notre cerveau sait s’en protéger. Il analyse la situation, propose une réaction puis se relâche. Dans une zone de conflits, ces situations sont très fréquentes, rapprochés et prolongées. Le relâchement devient alors impossible, on parle alors de stress dépassé. Le traumatisme psychique, lui, est un état d’effroi, au delà de la peur. Il conduit à ce qu’on appelle une rencontre avec le réel de la mort, on parle d’une effraction psychique.”

“Les réactions sont nombreuses et peuvent dérouter. Des peurs suite à un claquement de porte ou un bruit pour nous très banal, une forme de dépression, une hypervigilance, de l’irritabilité ou même de l’agressivité ! On a tous un peu l’image de la victime qui, secourue, serait reconnaissante et gentille. Mais ce n’est pas toujours le cas, n’oublions pas qu’il peut y avoir de la culpabilité d’être parti qui se mélange à un sentiment de honte. Surtout si des proches sont restés sur place.”

“Le rôle des accueillants est de permettre le repos, la pause. Mais attention à ne pas en faire trop. Être trop bien accueilli, ce n’est pas être accueilli «normalement », il faut trouver un juste équilibre pour qu’ils puissent se poser progressivement. Et souvent, on le constate, toute la famille d’accueil, unie, se met en 4 pour que les ukrainiens se sentent bien. C’est très gentil mais cela rend le déracinement et l’éloignement de l’exil encore plus violent.”

“Il ne faut pas chercher à absolument faire parler de la guerre, parler, c’est revivre la situation traumatisante. Il est donc important, à mon sens, de pouvoir accompagner ces familles d’accueil, de leur donner des notions-clefs sur les psychotraumatismes, de les écouter, les aider à trouver des solutions face à des barrières, à commencer par celle de la langue. Il me semble important d’imaginer des espaces de parole et d’échange. C’est par exemple ce que savent faire mes collègues du PFS au service des familles d’accueil. Cela peut-être une piste, d’autant que cela risque de durer.”

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